Quand je peins, je rentre dans une drôle de dimension, on pourrait presque parler de transe. Une transe calme studieuse mais terriblement déterminée, presque violente dans sa volonté d’accomplissement. Là, rien n’est plus important au monde.
On peut tout dire en peinture. Les émotions et les idées même les plus diffuses peuvent être capturées et peintes.
Toutes mes oeuvres sont autobiographiques
C’est une histoire qui part de moi pour devenir celle de tous. J’ai une banque de souvenirs que je transforme à ma manière. On vit des traumatismes, quand je suis capable de les peindre c’est que je les ai « testés », ils sont acceptés, au moins identifiés, digérés ou sur le point de l’être.
Quand j’ai fait la série noire en 2012-2013, j’étais terriblement malheureuse, je disais absolument tout ce que je vivais. Je cherchais des solutions à travers la peinture. Rares sont les personnes qui m’ont interrogée : Fabienne, es-tu heureuse ? Je dis « rares » car une sculptrice m’a dit que mes œuvres la mettaient particulièrement mal à l’aise. Je ne la connaissais pas. Je ne me voyais pas lui raconter ma vie, je me suis échappée avec une pirouette. Et pourtant, tout était dans la peinture, la solitude, la douleur, la violence, les personnages étaient décapités, démembrés, les yeux vides. Je me sentais exactement comme ça, perdue dans un pays qui n’était pas le mien et mal accompagnée sentimentalement.
Sauf que la peinture lugubre est à la mode, c’est normal de voir l’horreur, elle est partout. J’avais peur de peindre, le diagnostic une fois l’œuvre terminée était sans appel. En faisant le Saint Sébastien, je me rappelle avoir beaucoup pleuré. L’artiste s’il est honnête est totalement nu , plus encore qu’en écriture. Le spectateur n’a pas d’effort à faire contrairement au lecteur. Il suffit d’un coup d’œil et le verdict tombe. Ça plait ou non, sans appel ! Aucune question métaphysique. C’est dommage, on devrait toujours essayer de comprendre ce qui se cache derrière une oeuvre. je ne renie pas ce travail, il fait totalement partie de mon parcours. Il est douloureusement honnête.


Et puis il y a les rêves,
je les utilise pour les ambiances, les lieux. J’ai la chance de m’en souvenir. J’essaie une fois dans l’atelier d’en capturer l’essence, les couleurs sont souvent surprenantes. Parfois ils sont incompréhensibles, mystérieux. En ce moment par exemple, mon oncle JP vient me voir. Nous n’avions jamais eu beaucoup d’affinités lui et moi (il est mort depuis deux ans), même si il était artiste peintre. Dans le rêve, il m’appelle Fabi petit surnom que seule ma famille très proche utilise, je suis toujours surprise par cette familiarité dans sa bouche, la nuit dernière, il m’a dit : « je vais t’aider en peinture » sous-entendu peut- être, je ne peux rien pour le reste. Entre nous, je préférerai qu’il m’aide en écriture. En tout cas, il a l’air plein de bonne volonté :).

Je peux peindre des huit, dix heures sans interruption.
Lorsque je suis en période de création, je n’ai pas envie de sortir, ni de rencontrer des gens, de toute façon dans ces moments, j’ai du mal à écouter, je suis dans ma peinture (même quand je n’y suis pas). Après une journée dans l’atelier on dirait que j’ai bu, Je suis hagarde, le cerveau en marmelade, incapable de me concentrer.Le métier d’artiste est un long chemin de solitude sur lequel je me sens bien.

Le fantasme absolu serait de partir
avec mon chéri dans un bois pendant deux mois, sans voiture, sans téléphone, ni internet.
Là j’entends la petite voix de Léa qui me dit : « Et moi Maman ? » et moi de lui répondre ; « c’est un fantasme ma chérie, on le fera un jour, quand tu n’auras plus besoin de nous ».
Quand je reste longtemps sans peindre, j’ai la terreur de ne plus savoir. C’est la même chose pour un tableau en cours, j’ai peur de perdre le fil de ne plus rentrer dans la transe, danse qui va l’amener à bon port.
Le fait que les gens ne te demandent pas: es tu heureuse?c est peut etre aussi par pudeur. Ne pas vouloir en rajouter.
je suis artiste et je me retrouve dans ce que tu ecris .Je te souhaite du bonheur.
Etre ivre de creation. Vivre intensémentet transcrire l émotion.
mission de tout artiste. Belles créations. Nathalie Kalattyan alias Laurence Pichot
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Je ne remercie pour ce très sensible commentaire. C’est vrai qu’Il est souvent difficile de dire les sentiments.
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ILS TRANSPARAISSENT dans nos créations . Un privilège, une thérapie bienveillante pour chacun de nous .
❤
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