Hier, premier filage intégral de la pièce en présence de mon amie Fabienne Cabado.
Durant la seconde partie, je dois écrire la fameuse icône manquante, avec la technique originelle de la tempera et de la feuille d’or.
L’enjeu de ce moment est d’arriver à peindre et dire le texte dans un même élan.
Avant de commencer, j’étais dans un état d’esprit de lâcher-prise, autant pour le travail de peinture, que pour la manière de vivre le texte. L’expérience fut étrange. Les mots et les gestes se sont articulés très naturellement, nourrissant au fur et à mesure du texte un sentiment de bien-être. J’ai garder tout au long du processus, une conscience aiguë de mes mouvements, de mes paroles, une grande fluidité émotionnelle.
J’ai cassé et dilué l’œuf puis souillé le papier avec de grosses gouttes de peinture rouge. Je me suis mise à genoux devant la feuille, dans une position confortable. J’ai dû me relever à plusieurs reprises pour prendre de la couleur. Le va-et-vient a un peu bousculé le rythme de création. La prochaine fois, je préparerai mon matériel au sol. À la fin, j’étais un peu sonnée. Fière de ce que je venais d’atteindre. L’œuvre s’était faite avec détachement et un fort sentiment d’appartenance ce qui peut paraître contradictoire et n’est pas habituel pour moi.
Comment je la trouve ?

Brute dans le traitement, singulière dans l’émotion.
J’aime le rouge éclairé par l’eau en flaques, la peau froissée, brisée par des cernes et des cicatrices de couleurs. Le grain géométrique du papier s’est révélé sur le menton et le cou au séchage. Une ligne de pointillés gris traverse l’œuvre à la verticale, du sommet de la tête jusqu’au thorax . Ces tâches semblent être extérieures à l’œuvre. Elles ne souillent pas le personnage. Cette icône se tient derrière une vitre ?
J’ai appliqué la feuille d’or rapidement. Le résultat est grossier. J’ai fini l’opération à la main, réflexe primordial, puisque la technique habituelle me résistait.
Le jaune encadre le personnage en transparence en se superposant aux autres couleurs.
Cette femme n’est pas jeune, les yeux cernés de brun, les paupières supérieures tombantes révèlent son âge. Elle regarde de côté, la tête penchée dans une posture d’écoute. De distance ? Elle est plus grave que triste.
Ce qui me frappe, ce sont les pupilles bleues disproportionnées, anormalement asymétriques qui s’intègrent pourtant correctement au visage. Les sourcils hauts semblent interroger de manière un peu dubitative. Le dessin de la bouche est étroit, ramassé, sans commissure. Les lèvres entrouvertes ne laissent échapper aucun son. Sa bouche de geisha, est sans aucun doute un élément de séduction, un signe de soumission aussi ; le contraire de ce qu’on appelle une grande gueule.
Elle est là.
Bouleversant! Malgré le regard plutôt sérieux, l’œuvre dégage une énergie flamboyante. Un feu intérieur l’anime…
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Cette performance est plus qu’une aventure, une nécessité. Merci pour ton commentaire, il me touche.
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